Et pour se faire publier ?
Se faire publier est un vaste problème.
La plupart des éditeurs, il faut bien l’avouer, ne peuvent pas lire correctement tous les manuscrits (tapuscrit devrais-je écrire)
qu’ils reçoivent.
C’est pourtant leur boulot, pourriez-vous me rétorquer.
Je vais me faire l’avocat du diable : leur métier est avant tout de publier des livres. Avec tout ce que ça implique (et c’est assez
colossal, croyez-moi). Ils ne peuvent consacrer un budget faramineux à tout un service de lecture qui devrait employer plusieurs
dizaines de personnes en permanence pour tout lire.
Car les éditeurs reçoivent beaucoup de manuscrits, tous les jours.
En général, le manuscrit est survolé. On lit les dix premières pages, les dix dernières, un passage par-ci, un autre par-là et si
vraiment c’est bon, alors on entame une lecture plus honnête. Sinon c’est retour à l’expéditeur.
Les plus professionnels des éditeurs gèrent un cercle de lecteurs qui reçoivent les manuscrits, les lisent vraiment (en théorie)
et rédigent une fiche de lecture. Le « hic » est qu’en général le lecteur en question n’est pas éditeur. C’est quelqu’un qui aime
la lecture et qui est payé en plus de son travail (d’enseignant, de bibliothécaire, de libraire…etc.), jusque là, tout va bien. Mais
on effectue rarement un premier tri en fonction du genre, c’est là que ça pose problème. Le manuscrit d’un thriller peut arriver entre
les mains d’un lecteur plus habitué à une littérature « blanche », et il va juger le texte selon des critères qui ne seraient pas
nécessairement ceux d’un éditeur de romans policiers. Je mets volontairement en avant une procédure un peu chaotique, il y a des fois
où tout ce passe bien mais force est de constater que ce n’est pas souvent le cas dans ce meilleur des mondes.
C’est cynique.
Mais c’est vrai.
La réalité est ainsi, il faut faire avec.
Alors comment faire ?
Il n’y a pas six solutions.
Envoyer votre livre, et croiser les doigts. L’envoyer à tous les éditeurs qui sont susceptibles de publier le genre qui vous intéresse.
Multiplier les chances.
Je me suis rendu compte assez tôt de ce système plus qu’aléatoire, et qui d’une certaine manière m’a démontré que le milieu de l’édition
était finalement comme tous les milieux professionnels : mieux vaut connaître quelqu’un pour obtenir un petit coup de pouce.
A titre indicatif, je peux vous raconter mon histoire, elle resservira peut-être…
Au moment où j’ai su que je voulais être édité, n’ayant aucune connaissance dans le monde de l’édition, j’ai décidé de me rapprocher de
cet univers étrange, pour me faire mes connaissances. J’ai décidé d’être libraire.
Le métier me plaisait, et surtout, il me permettait d’être en contact plus ou moins direct avec certains éditeurs.
Pendant deux ans et demi j’ai démontré mon dynamisme, ma « culture » du roman en général, pour que ces éditeurs aient une petite idée de
qui j’étais, jusqu’à bénéficier d’un minimum de crédit auprès de ceux que je ciblais.
Finalement, c’est par une toute autre voie que j’ai été publié, ce qui est assez ironique.
C’est sur les conseils d’un collègue libraire que j’ai passé mon manuscrit à un ami représentant avant que celui-ci aille le donner à
lire à un éditeur pour lequel il travaillait.
Le « hasard » (qu’il faut un peu forcer de temps en temps) a fait que je déjeunais avec cet éditeur la semaine suivante où j’ai pu lui
parler en détail du manuscrit qui dormait sur le bureau d’une de ses collaboratrices. Après quoi il l’a lu… Vous connaissez la suite.
Se faire publier est donc ardu, mais possible.
Par l’envoi postal, ou par d’autres moyens qui demandent des efforts parfois de longue haleine, mais tout est possible.
Ah, et pour finir je me dois de vous préciser : être libraire aura été ma plus belle expérience humaine et professionnelle avant de
devenir romancier. Il m’arrive parfois de vouloir ouvrir une petite librairie en bas de chez moi, juste pour retrouver certains aspects
du métier…